Ah, la douce France des valeurs républicaines, où l’on peut dire « les Noirs sont bons à ramasser le coton » à la récré… et se plaindre ensuite qu’on vous sanctionne !

Décidément, l’école n’est plus ce qu’elle était : on ne peut même plus faire un petit racisme d’antan sans se retrouver convoqué, puni, et privé de PlayStation. Sauf que cette fois, à Rémire-Montjoly, les parents du mini-colon n’ont pas aimé. Non, pas les parents du gosse insulté, hein — ceux du poète du coton. Et, comble du cocasse, ils sont eux-mêmes forces de l’ordre. Autant dire qu’ils ont le sens du devoir : quand fiston dérape, on dégaine... la plainte contre la principale du collège  !

Logique. L’État, c’est eux. L’école ? C’est leur salon. Et la cheffe d’établissement ? Une intruse qui ose troubler leur plantation administrative. Mais les parents d’élèves, eux, ne sont pas restés les bras croisés. Non. Ils ont sorti leurs pancartes, leur dignité et leur mémoire collective. Parce que, voyez-vous, en Guyane, on n’a pas la mémoire courte. On sait ce que ça veut dire, le coton.

On sait aussi ce que ça coûte, le silence. Pendant que la principale se faisait auditionner comme une criminelle d’État, la République, elle, faisait ses grands discours : – « Tolérance, égalité, vivre-ensemble », – « L’école doit être un lieu d’apprentissage », – « Pas d’amalgame », Bref, le bingo complet du fonctionnaire en apnée devant un scandale. Heureusement, Gabriel Serville, Antoine Poussier, les députés Rimane et Castor, tout le monde s’y est mis. Il ne manquait plus que Marianne elle-même, brandissant un sabre laser républicain, criant :

« Qu’on envoie le petit cotoniste en stage intensif chez les coupeurs de cannes ! »

Mais soyons sérieux deux minutes. Ce qui choque ici, ce n’est pas juste la phrase d’un gamin – les enfants répètent souvent ce qu’ils entendent à la maison. Ce qui choque, c’est qu’on en arrive à interroger la principale plutôt que de s’interroger sur ce qu’on transmet à nos gosses. Et pendant qu’on demande à la cheffe d’établissement de “rester apaisée”, les parents d’élèves, eux, bouillonnent.

Normal : quand on a combattu pour que nos enfants ne soient plus traités comme des sous-hommes, on ne “s’apaise” pas face à un coton-gate. Alors oui, la colère est légitime. Oui, les parents ont raison de ne rien lâcher. Parce qu’à force de banaliser le racisme “de cour de récré”, on finit toujours par récolter des générations de grands brûlés de la conscience. Et qu’on se le dise :

Le coton, aujourd’hui, on le porte. On ne le ramasse plus. Et encore moins quand il sort de la bouche d’un môme qu’on n’a pas éduqué, mais dressé.